Publié le
par
Alain Messier
Avec son cinquième album, il fallait faire le point avec Michel Herblin… On va donc parler musique, entre autre. J’imagine que vous souhaiteriez aussi tout savoir sur l’harmonica… Nous aborderons la question et les plus curieux pourront s’intéresser aux stages qu’il organise et qui figurent sur son site.
- Michel Herblin, c’est le cinquième album si j’ai rien raté. En premier lieu, il semble que le son Herblin n’est plus simplement le son de ton harmonica, mais le son d’une équipe… Que peux tu nous dire sur ce travail et le travail commun ? Et sans doute quelques mots au sujet Guillaume Wilmot (pianiste, organiste, accordéoniste et arrangeur).
MICHEL HERBLIN: …C’est vrai que cette fusion de compétences est l’œuvre de mon ami Guillaume WILMOT. La réalisation de l’album The MELODIST lui doit beaucoup ! Sans lui, cette initiative d’enregistrer collectivement une trame LIVE sur laquelle s’appuyer pour étoffer toute l’orchestration - et incorporer les instruments additionnels - n’aurait pas vu le jour.
Et quel confort de retrouver une équipe d’excellents musiciens pour construire une couleur cohérente et homogène ! Le studio où nous avons répété et enregistré était en cours d’aménagement : un endroit « brut de décoffrage » - parpaings nus et dalle béton… Mais les voyages et le rêve étaient notre magma, une énergie qui écoutait chanter la joie de jouer. Cet album sent bien sûr la sueur du labeur, mais il respire avant tout une solide bonne humeur de complicité entre des gars tout simples, intuitivement amoureux du beau travail.
Fort de cette matière première, je me suis ensuite réfugié dans mon laboratoire de voyage (une « petite » station M.A.O initialement profilée pour le baroud… j’avais prévu de finaliser certaines prises dans la région de Michaël Devineau en louant un gîte où travailler en toute sérénité… tout près de la source des beaux réglages !). Le confinement aura calmé toute velléité d’exotisme… J’ai donc entrepris - sous le regard de la rivière Dordogne - de redessiner toutes les parties d’harmos où j’estimais devoir améliorer soit le son soit les phrasés soit les solos joués un peu trop à l’arrache. Une véritable épreuve ; confronté à l’intimité de devoir choisir, trancher, sélectionner LA bonne prise…
Mais je me suis enfin régalé à ne cesser de jouer qu’une fois satisfait de mon interprétation. Chose qui ne m’était jamais arrivée ! (Matins aux Pommes : tous les harmos définitifs enregistrés en une matinée - Golden Melodies : tout l’album enregistré en deux journées - Honey MOod : Prises LIVE sur quatre sessions avec deux guitaristes et un bassiste - et limogeage d’un sujet de discorde à la six cordes - remplacé intégralement par « le joker » Guillaume WILMOT... C’est là que j’ai compris le rôle crucial d’un tel Magicien !).
L’expérience « Mélodies buissonnières » a confirmé et soudé cette amitié complice au gré d’un album duo (enregistré en une après midi dans le show-room pianos de Bergerac Music - avec studio mobile).
- Il n’est pas si fréquent d’entendre Michel Herblin au chromatique… Qu’est ce qui t’a pris ?
MICHEL HERBLIN: L’harmonica chromatique me fait peur, il est (pour moi) truffé de pièges et de (fausses ?) notes - inattendues - qui arrivent par surprise et se glissent comme un pâté dans les volutes mélodiques d’improvisations absolument indomptables. Je l’appelle « l’harmonica traumatique »… Et pourtant c’est tellement magnifique ! …Quand c’est joué avec brio. Malheureusement, j’ai quelques jolis thèmes qu’il me tenait à cœur de voir exister, alors j’ai bien été obligé de travailler…
- Amoureux de la langue française, d’humour et de bons mots comme tu l’es, il est assez étonnant que tu ne fasses que des titres instrumentaux. As tu des projets d’écriture, chanson, sketch, nouvelles, ou quelque chose apparenté ? - Quels sont les Arts qui te touchent plus particulièrement en dehors de la musique ?
MICHEL HERBLIN: Certes je pense manier le verbe avec espièglerie et fantaisie… De là à imaginer du gros œuvre ou des travaux plus construits… Oulà ! Laissons cette compétence à ceux dont c’est le talent. (J’ai néanmoins quelques chansons à mon actif - dont une qui sort tout bientôt sous la forme d’un très joli clip signé Mickael Mazaleyrat !). « Écrire délivre », ça aura été le fil conducteur d’une sévère thérapie baptisée : « Auto-psy, mémoire d’une agonie »…
Mais avant ça, j’avais pondu une belle multitude de textes plus ou moins poétiques et chantables... classés sans suite. Néanmoins, la plupart de mes musiques sont appuyées sur des paragraphes ou groupes de mots qui définissent la scansion de certains thèmes (mais c’est secret). Et toc !
Sinon, les Arts que j’apprécie ? …Les Arts graphiques (diplômé de l’École ESTIENNE, 15 ans dans la « réclame »), la photographie, l’aquarelle (la plus belle des peintures car elle oblige à réfléchir aux transparences), et aussi la pêche à la mouche en tant que discipline et maîtrise du geste… Mais c’est un peu comme dans ma vie sentimentale : je dors souvent bredouille…
- A propos d’écriture, pas de méthode Michel Herblin en vue… Mais l’enseignement de l’harmonica au travers de tes stages c’est une façon d’avoir un contact avec tes plus fidèles auditeurs j’imagine ! Une façon aussi de partager ta pensée, ta vision de la musique ?
MICHEL HERBLIN: Les méthodes d’harmonica, il en existe à ras bord - et de très bien faites… je ne me sens pas d’en rajouter un énième juste pour le plaisir de signer un ouvrage de plus. Par contre, expliquer de vive anche la façon de dérouler telle ou telle phrase musicale, la façon de faire chanter, sonner, vibrer un harmonica : ça, ça n’est pas possible sur le papier (ou alors en vidéo ?)…
J’apprécie le contact humain et la complicité émerveillée des stagiaires qui viennent s’apercevoir qu’ils savaient déjà tout jouer ce que je leur suggère… « mais ils ne se rappelaient pas encore savoir le faire ». (ici, mon job, c’est juste dépoussiérer l’impossible qui reste trop souvent bloqué dans les musiciens en herbe). Après, oui, libérer l’improvisation en améliorant sa technique instrumentale, développer son instinct mélodique pour aller gambader dans d’autres prairies : oui, là il y a un terrain d’aventures, un jardin d’enfants où tous les rêves sont permis ! Il suffit d’aller les cueillir.
- Beaucoup d’harmonicistes ne font que reprendre et reproduire en améliorant parfois… Toi tu as créé un style et on peut dire une école… Comment cela t’es venu, comment cela s’est passé ? C’est la question « histoire d’un styliste » en somme.
MICHEL HERBLIN: C’est juste un choix de vie qui a mal tourné… En fait, ce que j’adore dans l’éclectisme, c’est la variété …(en oubliant le sens péjoratif du terme).
Je ne me sens plus capable de n’aimer qu’un style de Musique ; toutes ont leur charme, leur pouvoir, leur attrait. C’est vraiment un bonheur de pouvoir voyager à travers les âges et les paysages - rien qu’en jonglant avec les arcs-en-ciel des Cultures !
Pour ce qui est de ce goût irrépressible d’inventer des chansons instrumentales faisant honneur à mon instrument d’Amour, là, j’avoue… Mystère ! …Sans doute un étrange besoin d’harmonie qui est probablement le seul terreau fertile où semer des mélodies ? …Une revanche sur des rancœurs mal digérées ?
- On sait facilement que tu es préoccupé par l’écologie, la nature, et la place de l’humain dans nos sociétés actuelles. Je souhaitais te donner l’occasion de t’exprimer à ce sujet. De quelle manière fais tu le lien entre ces sujets et ta musique, si tu le fais bien sûr ! Sinon je vire cette question.
MICHEL HERBLIN: Non, ne vire pas cette question (par contre, elle est copieuse !)… Alors… Si, je crois qu’un Musicien ou tout autre Créateur est le reflet de son environnement - social et naturel (ou artificiel ?)… Ses travaux prennent généralement la couleur de son âme, l’odeur de ses convictions.
Alors oui, l’écologie devrait remplacer ou au moins supplanter toutes les religions (même et surtout celle de notre civilisation de sur-consommation). Je crois totalement stupide de poursuivre des raisonnements de confort social sur une planète en danger de mort…
De là à imaginer un lien entre ma musique et tous ces ingrédients d’idéologies qui ne dureront jamais plus qu’un clin d’Histoire… J’espère juste être en cohérence, ou ne serait-ce même qu’en « co-errance » !
- Il n’est pas de bonne communication sans soin de l’image et indiscrétion alors j’ose la question érotique que tous tes fans se posent depuis longtemps… Michel Herblin ...Slip ou caleçon ?
MICHEL HERBLIN: Sliboune ! Inconditionnel du holster à cacahuètes ! …C’est trop douloureux quand une noisette change de fuseau sous prétexte de se réfugier dans les bras de sa copine à cause d’un faux mouvement ou autre acrobatie inhabituelle.
- Si tu avais un conseil à donner à un jeune harmoniciste ou à un jeune musicien, ce serait lequel ?
MICHEL HERBLIN: Prends le temps d’apprécier ton parcours, le chemin est beaucoup plus intéressant que la ligne d’arrivée. La Passion est un muscle, c’est le moteur de toute une vie. Dans notre société malade de vitesse, l’Art de butiner est devenu condamnable. Joue, joue, joue et joue encore… sans jamais oublier que le temps détruit tout ce qu’on fait sans lui !
- La question manquante… Quelle est la question capitale qui manque à cet interview ?
MICHEL HERBLIN: Est-ce qu’il reste du cassoulet ?
- Quelle est la réponse à cette question ?
MICHEL HERBLIN: Tu devrais essayer ma recette avec du gingembre…
Lien vers le site de Michel Herblin. STAGES HARMONICA // ALBUMS // TELECHARGEMENTS// ETC
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